Brèves de voyage
Après trois petites journées de repos à Malhaussette, nous sommes reparties sur la route à travers les dernières vallées cévenoles. Nous sommes au pied du Mont Aigual, les deux filles vérifient la météo et nous voilà à monter 1200 m de dénivelé pour atteindre le sommet du Mont Aigoual et redescendre un peu pour passer la nuit. On se pose donc sur les pistes de skis, l’herbe est encore bien jaune … Puis une petite journée et nous arrivons dans la ferme de Servillières sur le Causse Noir où nous attend un grand champ bien vert où nous nous regalons. Après quelques jours, nous repartons pour traverser les Causses (Causse Bégon, Causse du Larzac). La pluie ne dure même pas la première journée mais le vent du nord et le froid ne faiblissent pas des 5 jours de marche ! Si les filles se font inviter au chaud une nuit ou trouvent refuge dans des hangars ou granges, nous, nous sommes toujours dehors et nous en patissons aussi physiquement. Au final nous arrivons toutes les quatres (sauf peut-être Prisca qui a l’air de bien aller) fatiguées et un peu abimées physiquement à la ferme de Vispens sur la fin des causses au-dessus de Saint-Affrique. Les souvenirs des paysages de plateaux où l’herbe est balayée par le vent sous une lumière rasante nous donnent quand-même envie de continuer à traverser tous les jours de si beaux endroits!
L’agriculture rencontrée
Les Causses sont des plateaux calcaires à une altitude comprise en général entre 500 et 900m de moyenne. Ces terres sont en partie des pâturages dans les prairies et landes qui recouvrent les sols peu profonds. D’autres parties comportent des sols fertiles et sont cultivées en céréales et fourrages. Ils réalisent des céréales d’hiver car la saison d’été est sèche et courte. Les troupeaux sont essentiellement des troupeaux ovins, notamment en laitier pour le lait roquefort.
Le Roquefort était autrefois réalisé par une coopérative d’agriculteurs mais suite à des problèmes financiers, ils ont vendus les caves et la coopérative à l’entreprise Société. Aujourd’hui le Roquefort est réalisé en grande partie par Société ou quelques autres industriels plus ou moins grands qui louent une partie des caves. Les
agriculteurs qui fournissent le lait pour le Roquefort ne contrôlent pas le prix du lait qui est en moyenne à 1€/L, variable selon le moment de l’année, le taux protéique et butyrique et les taux de cellules. Le Roquefort semble représenter une grande partie de l’activité économique de cette zone géographique, avec 1800 élevages ovins qui livrent du lait pour ce fromage, ainsi qaue tous ceux qui vivent de la suite de la chaîne de production: les laiteries, les caves d’affinage à Roquefort-sur-Soulzon (où le fromage arrive déjà moulé, pour l’affinage de quelques semaines dans les caves naturelles de la montagne du Combalou), la logistique (les communes alentours hébergent des grandes plateformes de logistique), la vente, etc.
Il y a aussi des troupeaux de vaches à viande type Aubrac. L’eau est aujourd’hui remontée des vallées autour des causses mais anciennement, c’était un bien très rare. Elle était
stockée dans des citernes sous les maisons pour l’usage domestique et dans des « lavognes », des dépressions dans le paysage qui étaient parfois pavées afin de garder l’eau de pluie pour abreuver les troupeaux.
Une lavogne vide à Viala-du-pas-de-jaux sur le plateau du Larzac
Nous avons passé quelques jours sur une ferme de 600 brebis en conventionnel, livrant en moyenne 1700 L de lait à une laiterie Roquefort. Ces trois frères en GAEC ont vendu une partie des terres familiales du causse voisin, le Causse Bégon, et sont en fermage sur cette ferme de 430 ha, ce qui leur premet de travailler à trois sur une même ferme. Nous en avons rencontrés d’autres qui sont sortis de ce système (où le lait est livré à une entreprise sans qu’il soit possible de participer aux décisions ou à la fixation du prix), soit en livrant à des coopératives bio pour d’autres produits laitiers, soit en ouvrant une fromagerie artisanale avec leur activité d’élevage afin de pouvoir avoir un prix du lait plus rémunérateur.
La ferme de Vispens, sur les contreforts au-dessus de Saint-Affrique, a été acquise par Terre de liens en 2009, avec un projet de vache à viande et de brebis laitières. Malheureusement le hameau n’était pas relié à l’eau de ville et la transformation laitière prévue n’était donc pas possible. Ils se sont donc spécialisés dans la vache à viande (race Aubrac) tout en gardant un petit troupeau ovin et caprin pour le plaisir et pour qu’il entretienne la végétation que les vaches ne consomment pas. Les vaches sont en plein air intégral, même l’hiver car cette race est rustique et qu’il n’y a pas assez de place dans les bâtiments pour rentrer l’ensemble du troupeau (60 au début, 25 aujourd’hui).
La viande est commercialisée en circuit court, par livraison de colis de viande ponctuellement. Le rayon desservi est encore très large (par exemple jusqu’à Alès), mais l’agriculteur souhaite réduire la zone de livraison, en comptant sur la fidélisation de sa clientèle.